Les 16 de Basse-Pointe

Martinique, 1948. À la suite d’une grève des ouvriers agricoles, le béké Guy de Fabrique (blanc créole, patron de l’économie sucrière) est brutalement assassiné dans les champs de l’Habitation Leyritz. Alors que des tensions sociales s’accumulent depuis quelques années, cette affaire cristallise l’échec de la politique d’intégration française. Très vite, des procédures judiciaires expéditives sont engagées pour retenir les « 16 de Basse-Pointe ». Déplacés à Bordeaux, ces accusés sont mis en prison préventive et risquent la peine de mort. C’est alors qu’une campagne médiatique menée par les communistes permet d’interroger la légitimité de ces procédures, et ses relents de colonialisme. Sur les traces des archives personnelles de l’avocat de la défense Georges Gratiant, Camille Mauduech va à la rencontre de ceux qui ont vécu cette affaire.

Si Camille Mauduech s’était contentée de faire un film aux propos politiques affirmés, elle aurait eu d’emblée le mérite de contester les lieux communs du post-colonialisme. Or, elle va plus loin : s’affichant devant la caméra dès les premiers plans, elle met en place une méthode de recherche cinématographique d’une incroyable franchise. Confrontant les témoignages et se montrant au travail, elle met en place un dispositif où les dogmatismes n’ont jamais lieu d’être. Derrière son intérêt pour l’histoire du colonialisme français, se dévoile ainsi une honnêteté intellectuelle qui ne fait que renforcer la pertinence de sa démarche. Victimes ou assassins ? Les enjeux de l’affaire des « 16 de Basse-Pointe », ainsi que le concept de réel, ne se limitent pas à une fausse alternative entre vérité et mensonge.