[expo] Suzanne Valadon : Un œil noir te regarde !

Dernière exposition au Centre Pompidou avant sa fermeture jusqu’en 2030, la rétrospective consacrée à l’œuvre de Suzanne Valadon offre de découvrir une maîtresse femme et un sacré maître.
Modèle de Renoir, amante de Toulouse-Lautrec, élève de Degas, mère d’Utrillo, Suzanne Valadon existe en elle-même et pour elle-même grâce à la plongée inédite dans son œuvre qu’accueille le Centre Pompidou. Adaptée de l’exposition présentée à Metz en 2023, celle-ci s’inscrit dans la volonté du musée d’approfondir la connaissance des artistes femmes et d’accroître la part de leurs œuvres dans la collection permanente. Après Alice Neel, Georgia O’Keeffe, Dora Maar et Germaine Richier, c’est au tour de Suzanne Valadon, de ses dessins « méchants et souples », comme disait Degas, et de son regard sévère, d’être à l’honneur.
Femmes puissantes
La belle idée des commissaires de l’exposition (Nathalie Ernoult, Chiara Parisi et Xavier Rey) est d’avoir installé les œuvres de l’artiste en regard de celles de ses contemporains. Si la magnifique Japonaise de Georgette Agutte soutient la comparaison avec les nus de Suzanne (ainsi surnommée par Toulouse-Lautrec parce qu’elle commença en posant pour des vieillards !), le trait de Marie Laurencin, pour ne citer qu’elle, semble mièvre et évanescent face à la force et à la vérité crue de celui de Valadon. Bourrelets, seins pendants, cellulite, scoliose : foin des nymphes imberbes qui font rêver les mâles ! Fatigués ou contorsionnés, griffés par l’âge ou la peine, les nus de Suzanne Valadon montrent leurs sexes et leurs visages sans fards.
Splendeur de la chair
Menton décidé et sourcils en accents circonflexes au-dessus d’un regard aussi insolent que décidé, l’artiste apparaît dans ses autoportraits, eux aussi sans concession : ils révèlent une âme trempée, qui « peint les gens pour apprendre à les connaître » et les natures mortes pour montrer la mort roide et cruelle du lièvre rapporté de la chasse par André Utter, son second mari. Si certaines œuvres – ainsi les paysages – séduisent moins que les portraits, la puissance qui se dégage de cette galerie de corps et de visages cernés de noir dans un chatoiement de couleurs franches, est époustouflante.
Exposition Suzanne Valadon au Centre Pompidou, à découvrir jusqu'au 26 mai 2025
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