Kommunalka

À Saint-Pétersbourg, une vingtaine de personnes partagent un appartement communautaire : une cuisine pour tous, une douche pour tous, et des faux-semblants et des rancunes qui s’accumulent… Vestige de l’URSS, ce type de logement est encore fréquent dans la Russie actuelle. En souvenir d’une période passée dans la « Kommunalka » de la rue Sovetskaya, la réalisatrice Françoise Huguier réinvestit ce huis clos anachronique, partageant avec ses habitants une intimité que la configuration même du lieu semble refuser. Différentes classes sociales, différentes origines, différentes tranches d’âge : de ce portrait multiforme se dégage l’inévitable constat d’une promiscuité partagée. Celle-ci semble exemplifier les rapports humains et sociaux d’une Russie qui peine à donner sens à son héritage communiste…

Problème sociétal incontournable, cette redéfinition des modèles soviétiques travaille de fond en comble le long métrage. Dans ce contexte particulièrement difficile, des individus peu attachés mènent leur vie avec désillusion et marasme. Avec ses plans fixes symétriques et balisés, Françoise Huguier restitue un quotidien aigre et sans intérêt, où la mort ronge les plus vieux et la vie se montre ingrate envers les plus jeunes. Face à une caméra qui se veut émouvante, les différents personnages de cette existence gratuite nous déversent une intimité proprement impossible, d’un point de vue à la fois social et filmique. Tout comme le silence amer qui règne parmi les habitants de Kommunalka, les rares interactions entre l’équipe de tournage et l’objet de leur documentaire auraient pû être encore plus poussées.