[expo] Auguste Herbin au Musée de Montmartre : L'explorateur de la modernité

C’est une première à Paris. Le Musée de Montmartre propose une traversée de l’œuvre de l’injustement malaimé Auguste Herbin. Du 15 mars au 15 septembre 2024, pour sa gloire et sa postérité.
C’est la toute première fois qu’un musée parisien consacre une exposition rétrospective à Auguste Herbin (1882-1960). Un artiste méconnu, rejeté parfois, disparate peut-être, qui a passé 18 ans au Bateau-Lavoir dans le quartier de Montmartre, et qui a côtoyé les plus grands peintres du XXe siècle sans jamais atteindre leur notoriété.
Herbin, maître de la couleur dont on dit pourtant en 1912 outre-Manche - tandis qu’il fait partie des premiers modernes à être exposés à Londres, tout le « charme que les peintures presque monotones de Picasso ne possèdent pas ». Herbin dont la cote vaut deux fois celle de Georges Braque en plein cubisme, Herbin dont on aperçoit l’œuvre Parfum n°2, peinte en 1954, derrière Catherine Deneuve dans Belle de jour, le film de Luis Buñuel sorti treize ans plus tard. Herbin à qui Victor Vasarely, le pape de l’Op art, doit tout.
Enfant du siècle
Auguste Herbin, né en 1882, précède de quelques années la naissance de la modernité. Pourtant son œuvre, comme entend le montrer le choix opéré par le Musée de Montmartre, en est une complète traversée. L’exposition suit la chronologie de l’Art moderne en sept étapes. Sept périodes caractéristiques et courants qui succèdent à l’Impressionnisme, dont Herbin adopte la manière. On le découvre fauve et déjà il bascule dans le cubisme avant de passer à l’abstraction, d’y revenir - qu’elle soit géométrique ou non, de multiplier les allers-retours avec la figuration transcendée par ses nouveaux acquis. Herbin explore, et parfois échoue. Comme à produire des objets monumentaux qu’il souhaitait voir intégrer, en utopiste, dans des villes idéales.
L’acmé de l’alphabet plastique
Au cœur des huiles en provenance de la galerie Lahumière, du Musée d’Art Moderne de Paris ou du musée Kröller-Müller se trouve un pan essentiel de son travail : l’élaboration durant la Seconde Guerre mondiale de son « alphabet plastique ». Un langage de couleurs associées à des formes, comme un code informatique, qui lui permet de composer à l’infini des œuvres à partir de mots séquencés en lettres. Cette révélation lui vient de la découverte de la fameuse « roue des couleurs » de Goethe, et de sa rencontre avec le très ésotérique Rudolph Steiner de sa Société anthroposophique. Un alphabet et le vœu de « l’art pour tous » qui vont, repris par le Hongrois Vasarely quelques années plus tard, aboutir au succès colossal et « torture optique » comme on dit alors, de l’art cinétique.
Exposition Auguste Herbin au Musée de Montmartre, à découvrir jusqu'au 15 septembre 2024
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