[expo] Berthe Weill au musée de l'Orangerie : Place aux jeunes !

Émilie Charmy (1878-1974), Portrait de Berthe Weill © MBAM / Julie Ciot © Adagp, Paris

Le musée de l'Orangerie accueille l'étape française d'une remarquable exposition consacrée à Berthe Weill, galeriste d'avant-garde injustement tombée dans l'oubli. Passionnante réhabilitation !

Celle que Raoul Dufy surnommait « la petite Mère Weill » fut la première à vendre des Picasso, à promouvoir la peinture de Toulouse-Lautrec, à exposer les Fauves et à repérer les cubistes ; elle fut la seule à couronner Modigliani de son vivant, ou à accrocher les œuvres des femmes (on découvre celles d’Émilie Charmy, « l’amie d’une vie », avec bonheur) sans les distinguer de celles des hommes… Elle aurait dû avoir à sa porte « une limousine grosse comme une locomotive » disait le critique d’art André Warnod. Mais ni l’histoire ni la postérité ne retinrent son nom : même ses cendres furent évacuées du Père-Lachaise en 1994 !

Pan, dans l’œil !

L’exposition consacrée à cette découvreuse exceptionnelle, à la fois mécène et marchande, qui préféra se sacrifier plutôt que d’abuser de la vulnérabilité des débutants, rend hommage à sa modestie rétive à la spéculation, à sa générosité, à son indépendance de corps et d’esprit, et à son flair sidérant qui en fait l’égal de Vollard, Kahnweiler, Rosenberg ou Guillaume. Sa renommée ainsi restaurée doit beaucoup à Marianne Le Morvan, fondatrice et directrice de ses archives reconstituées, dont le fervent et patient travail d’enquête et de collection éclaire cette exposition organisée avec Sophie Eloy, Anne Grace et Lynn Gumpert pour les Musées d’Orsay et de l’Orangerie, le Musée des beaux-arts de Montréal et le Grey Art Museum de New York.

On verra bien !

La grande qualité de cette rétrospective, dont le clou est peut-être l’adorable portrait que fit Georges Kars en 1933, représentant Berthe Weill en souris malicieuse au milieu du capharnaüm de toiles qu’elle entassa successivement de la rue Victor-Massé à la rue Saint-Dominique, est de montrer combien son œil sut voir. D’un Picasso inaugural qui a tout d’un Matisse, des Fauves qu’elle sut apprivoiser jusqu’aux œuvres d’Otto Freundlich, que Berthe Weill exposa malgré l’opprobre imbécile des puristes de la race et du style : rien n’échappa à cette visionnaire enthousiaste, sage-femme des avant-gardes. Éblouissant !

Exposition Berthe Weill, galeriste d'avant-garde au Musée de l'Orangerie, à découvrir jusqu'au 26 janvier 2026

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