[critique] Rose Valland : Monument Woman

Rose Valland, attachée de conservation au Jeu de Paume, a permis de retrouver 60 000 œuvres d’art spoliées par les Nazis aux familles juives. Son destin incroyable est habilement raconté par Maud Lesur.
Rose Valland, héroïne de la Résistance française, est injustement oubliée. Impair, en partie, réparé avec Rose Valland, sauver un peu la beauté du monde, pièce écrite et mise en scène par Maud Lesur. Rappel des faits : à Paris, à partir du 1er novembre 1940, les Nazis, avec l’ERR (Einsatzstab Reichsleiter Rosenberg), utilisent le Jeu de Paume comme entrepôt d’œuvres d'art confisquées aux grands collectionneurs et familles juives françaises et envoyées en Allemagne. Sous l’impulsion de Jacques Jaujard, le directeur du Louvre, Rose Valland, attachée à la conservation du musée, va tout consigner, au péril de sa vie.
La salle des martyrs
Dans sa petite robe noire, chignon sage et lunettes rondes, Alexandra Sarramona incarne avec conviction cette demoiselle, lesbienne et discrète, qui assiste, désespérée, aux agissements des Allemands. Dans des décors aux panneaux tournants, on découvre par exemple « la Salle des martyrs », un local du Jeu de Paume qui abritait des œuvres d’art moderne. Celles-ci servaient de monnaie d'échange avec des toiles dites classiques plus appréciées des nazis. Grâce à Rose Valland, la Résistance stoppe un convoi de cinq wagons, affrété par le Maréchal Hermann Goering, qui contiennent des chefs-d'œuvre de l'art français. L’espionne racontera cet épisode dans son livre Le Front de l’art, adapté au cinéma en 1964 dans Le Train de John Frankenheimer et Bernard Farrel, avec Burt Lancaster.
Des archives qui parlent
Tout cela est raconté avec entrain par Antoine Bobbera, Marion Cador, Raphaël Cohen, Rémi Couturier et Xavier Fagnon qui alternent, parfois avec humour, les personnages à vitesse grand V. À la Libération, Rose Valland aidera les soldats américains des Monument Men, chargés de remettre la main sur les tableaux et autres sculptures volées (belles archives vidéo en fond de scène). Décorée, elle est empêchée de continuer son travail de restitution des œuvres (45 000 sur les 60 000 qu’elle a permis de sauver) à leurs propriétaires ou descendants. Un final un peu amer, pour cet hommage respectueux et ultra-pédagogique.
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