[critique] La Priapée des écrevisses : Une ogresse aux fourneaux

Andréa Ferréol dans La Priapée des écrevisses © DR - Fabienne Rappeneau

Vincent Messager confie à la flamboyante Andréa Ferréol le rôle de la Pompe funèbre, célébrissime cocotte qui fit mourir Félix Faure de plaisir. Un spectacle plaisamment truculent, rondement mené.

Clemenceau, expert ès vacheries, lança, en parlant de Félix Faure, « Il se voulait César, il ne fut que Pompée. » Ainsi naquit le surnom de Marguerite Steinheil, partie par l’escalier de service pendant qu’agonisait son amant présidentiel, pantalon sur les guêtres… Dix ans après, rebelote avec le double assassinat de l’impasse Ronsin, qui fit Marguerite veuve et orpheline d’un coup et la conduisit devant la justice, tant l’opprobre nourrissait le soupçon. Marguerite, acquittée, gagna l’Angleterre et devint baronne et pairesse en épousant Lord Robert Brooke Campbell Scarlett : qui travaille du popotin connaît les secrets du rebond !

Cuisine au sang

Christian Siméon, dont l’écriture carnassière se plaît à taquiner l’assassin et à ausculter le scandale, trouve une muse de compétition en la Veuve rouge ! Créé en 2002 par une Marilú Marini à l’inquiétante étrangeté, le rôle prend une autre couleur avec Andréa Ferréol, qui cache la perversité de son personnage sous des allures de grand-mère gâteau. Marguerite est en cuisine et prépare sa grande spécialité : les écrevisses à la Présidente, met raffiné autant que symbole des pulsions inconscientes et des parasites qui vivent en accapareurs. Chevelure de feu et abattage propre à celles qui n’ont pas besoin de jouer les faibles pour séduire, la comédienne offre une belle santé comique à son personnage.

Cuisinière étoilée

Elle fricote avec hargne et jubilation, aidée par une délicieuse arpète (Pauline Phélix), qui chante, danse et manie le fouet aussi bien que sa maîtresse. Vincent Messager ou Erwin Zirmi, dans le rôle du journaliste venu recueillir les aveux de Marguerite, complètent la distribution. Pétulante et gaillarde, Andréa Ferréol débarrasse son personnage des vapeurs de soufre qui l’entourent dans une société pudibonde qui déteste la chair. Elle fait de sa Marguerite une Médée vengeresse, une marmitonne féministe, une tigresse qui se rit de ceux qui l’ont moquée. Que faux-culs et culs bénis aillent se faire cuire un œuf !

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