Balle de match

Note d'intention : Faire du passé un récit présent. Ce match hors-norme a joué un rôle décisif dans la reconnaissance des athlètes féminines et, plus largement, dans l’histoire du sport féminin. Sous les apparences d’un simple divertissement, il a mis en lumière un machisme décomplexé, refusant de tolérer l’émergence d’une nouvelle génération de femmes prête à revendiquer ses droits. Bien que cet événement remonte à plus d’un demi-siècle, il est frappant de constater à quel point les luttes féministes des années 70 résonnent encore dans notre société contemporaine, de plus en plus divisée et polarisée. Cela se manifeste particulièrement dans les dernières élections américaines, marquées par une forte dimension « genrée ». Nous vivons aujourd’hui une époque à la fois décisive et fragile pour les droits des femmes : d’un côté, le mouvement #MeToo a permis de mettre en lumière les discriminations quotidiennes auxquelles elles font face, tandis que, de l’autre, les discours « masculinistes » n’ont jamais été aussi présents et assumés, que ce soit sur les réseaux sociaux ou dans les déclarations officielles, comme celles de Donald Trump. Les dix dernières années ont permis des avancées féministes majeures, mais elles ont également été suivies d’un « retour de bâton » d’une violence inouïe, comme en témoigne la remise en question du droit à l’avortement aux États-Unis. C’est pourquoi il me paraît aujourd’hui crucial de proposer des récits qui abordent des thématiques féministes, pour ma part, à travers le sport, véritable miroir de notre société. Au fil de mes recherches sur cette bataille des sexes, plusieurs questions ont émergé et sont devenues centrales : pourquoi une femme devrait-elle prouver qu’elle est meilleure qu’un homme pour être traitée et payée de manière équitable ? Pourquoi une femme puissante est-elle systématiquement perçue comme menaçante par la société ? Et surtout, pourquoi les stéréotypes de genre semblent-ils toujours autant interférer avec la question de l’égalité entre les sexes ?

Stéréotypes de genre et conflit générationnel
Billie Jean King et Bobby Riggs incarnent deux stéréotypes : la féministe enragée et le macho décomplexé. Du début du match jusqu’à son dénouement, chacun d’eux s’empare pleinement de son rôle, devenant ainsi des figures de proue de leur camp respectif. Ce qui frappe dans leurs interviews, c’est la difficulté de distinguer le vrai du faux. Tel des acteurs se préparant pour leur plus grand rôle, Bobby Riggs et Billie Jean King floutent les frontières entre leurs convictions personnelles et les attentes du public. Mais au-delà de cette confrontation des sexes, ce duel offre également une réflexion sur les incompréhensions générationnelles. Bobby Riggs est un retraité, ancien champion des années 30, alors que Billie Jean King, militante de 29 ans, incarne une nouvelle vision du féminisme. Ces deux générations, que tout semble opposer – l’une ancrée dans le passé, l’autre résolument tournée vers l’avenir – vont pourtant marquer ensemble l’Histoire du sport et, contre toute attente, nouer une amitié inattendue.

Une histoire américaine
En plongeant dans ce récit sportif, il est devenu évident que cette bataille des sexes ne surgissait pas par hasard en 1973. Elle s’inscrit au cœur d’une crise politique profonde aux États-Unis : guerre du Vietnam, Pentagon Papers, scandale du Watergate… Le président Richard Nixon est au bord du gouffre, tandis que les multiples scandales liés aux écoutes du Parti démocrate plongent le pays dans une paranoïa généralisée. Parallèlement à cette tourmente, un autre combat se livre : celui de la deuxième vague du mouvement féministe. Tandis que Bobby Riggs cherche à renvoyer les femmes à leur place (dans la cuisine) le Mouvement de Libération des Femmes manifeste dans les rues pour faire inscrire l’égalité des sexes au sein de la Constitution américaine, à travers l’Equal Rights Amendment (ERA). Ainsi, en septembre 1973, le match entre Billie Jean King et Bobby Riggs devient bien plus qu’un simple événement sportif : il incarne physiquement les tensions sociales et culturelles qui traversent l’Amérique à cette époque.

Flore Babled est à l'affiche de On ne paie pas, on ne paie pas ! (interprétation - EMC - Espace Marcel Carné) en 2025, Contes chinois (interprétation - La Ferme du Buisson) en 2024, Le Bourgeois gentilhomme (interprétation - Opéra-Comique) en 2023 ou encore L'Avare (interprétation - Théâtre de la Ville - Les Abbesses) en 2023.

Julien Storini est à l'affiche de Princesse de pierre / Rouge dents (musique - Théâtre de l'Échangeur) en 2026, Bâtards (interprétation - Théâtre 13 - Bibliothèque) en 2023 ou encore Le Fils de sa mère (Théâtre de Belleville) en 2022.

Léa Girardet est à l'affiche de Libre arbitre (texte, interprétation - Espace 1789) en 2024, Libre arbitre (texte, interprétation - L'Avant-Seine) en 2024 ou encore Libre-arbitre (texte, interprétation - Théâtre de Châtillon) en 2023.