Puisque nous sommes nés

Pernambouc, Brésil. Nego et Cocada ont 14 et 15 ans. Amis, ils passent leurs journées autour d’une gigantesque station-service, où se concentre le gros de l’activité économique de cet arrière-pays démuni. Nego a vu son père être assassiné sous ses yeux, et peine parfois à trouver une raison de ne pas tomber dans la criminalité – ou pire. Cocada vit avec sa mère et ses neuf frères et sœurs, dans un taudis insalubre dans lequel il est obligé de préparer des devoirs scolaires qui ne l’intéressent plus. Tous deux rêvent de partir et de gagner leur vie, et travaillent comme des adultes pour se procurer quelques miettes. Leur maturité est précoce et tout leur semble d’avance refusé. Néanmoins, ils tiennent à la vie comme ceux qui n’ont pas eu le choix, en essayant de la mener à bien.

Abordant un sujet qui pourrait les faire tomber dans l’idéologie ou dans le misérabilisme, Jean-Pierre Duret et Andrea Santana se détachent du lot. Avec une palette penchant du côté des couleurs sèches et des prises de son assez brutes, ils nous livrent des images d’une crudité qui évoque celle des films sociaux d’un Bunuel, sans pour autant faire l’apologie d’un réalisme travesti par un discours préconçu. Loin de servir de « cadre », la « réalité » (médiatique et politique) fait office de lointain : Lula essaye de se faire réélire, mais sa campagne est à l’écart de la vie des protagonistes. Ce qui intéresse ici : ce que ces deux gamins ont à dire, et la préparation qui a été faite pour en arriver là. Il ne s’agit pas de donner la parole, mais d’entendre.