[critique] L'Innocence de Hirokazu Kore-eda : Faux-semblants

© 2023 Monster Film Committee

En trente ans de carrière, le japonais Hirokazu Kore-eda a développé des qualités de conteur incroyables, surtout quand il s'agit d’ausculter les histoires de famille. En trois chapitres qui apportent chacun un regard différent sur une même histoire, l'auteur dresse un portrait de jeunes garçons perdus face aux injonctions de leur famille et de la société japonaise.

L'écriture du film s'enracine autour d'un événement initiateur : un incendie survient dans une petite ville japonaise, rassemblant autour de lui les habitants du quartier. Ce point de départ est repris dans chaque partie, et, d'un simple fait divers, devient le point central d'un drame où trône une école.

Les Mugino sont une famille mono-parentale depuis la mort du père, Saori élevant seule son fils Minato. Du point de vue cette mère, son enfant se conduit étrangement, ce qui va conduire à une inquiétude grandissante chez elle, et une volonté de trouver des réponses. L'école et l'enseignant de Minato sont fautifs, la résolution semble simple et définitive.

La richesse du projet de mise en scène choisit par Kore-eda tient dans la gradation qui s'opère à chaque nouvel angle de vue. Quand intervient le point de vue de l'enfant, c'est tout une ville qui a été balayée, un contexte planté, sans qu'on arrive encore à discerner où se situe le véritable problème toujours caché dans l'ombre de l'écriture.

Une éducation sentimentale

Ce qui est brillant chez Hirokazu Kore-eda, c'est sa capacité à tourner en permanence dans sa filmographie autour des mêmes motifs, la famille, la parentalité reconstruite et la différence, tout en trouvant des moyens de se renouveler et d'interroger la difficulté de faire famille dans une société où on peine tant à vivre ensemble. Que ce soit Sakura Ando en Saori, ou Eita Nagayama dans le rôle du professeur Hori, et bien sûr Soya Kurokawa en Minato, tous sont parfaits dans ces rôles où ils incarnent leur chapitre de l'histoire, y apportant une sensibilité et une perspective qui font de L'innocence un des plus beaux films de Kore-eda.

L'Innocence de Hirokazu Kore-eda, sortie le 27 décembre 2023 : toutes les séances à Paris et en Île-de-France

Partager cet article sur :

Nos derniers articles

Adaptation libre de la série L'Homme qui tombe à pic, The Fall Guy réussit brillamment à dépasser son statut de blockbuster. Derrière les explosions et le sensationnel, le long-métrage, adoubé par Steven Spielberg, est surtout un hommage aux cascadeurs professionnels avec une touche agréable de comédie romantique.

Première affaire s’attaque à la question passionnante des considérations morales qui animent une avocate débutante, et de la candeur dont elle doit nécessairement se défaire pour se tailler une place dans ce monde brutal.

Corse, 2017 : une surveillante pénitentiaire se retrouve mêlée à un double assassinat. Inspiré d'un fait divers, le nouveau film de Stéphane Demoustier joue la carte de l'austérité et de la sobriété. Le résultat ? Un drame soigné et ambigu, remarquablement interprété par Hafsia Herzi.

Premier film en tant que réalisateur de Florent Bernard, transfuge du studio Golden Moustache, Nous, les Leroy est un road trip familial avec José Garcia et Charlotte Gainsbourg. Cette comédie originale, récompensée du Grand prix au Festival de l’Alpe d’Huez, réussit le fin dosage entre humour et mélancolie.

Newsletter

Chaque mercredi, le meilleur des sorties culturelles à Paris.