[critique] Encore une journée divine : L'enfer, c’est les autres !

© Jean-Louis Fernandez

Retour attendu de François Cluzet sur la scène des Bouffes-Parisiens : Emmanuel Noblet adapte et met en scène le roman de Denis Michelis, offrant une partition de choix au comédien virtuose.

L’hiver étant propice à la dépression, on comprend que Robert ait eu besoin de faire une petite pause à Sainte-Marthe. Malgré le retour régulier des salsifis au déjeuner, les colocataires cinglés, la porte close et l’impossibilité de profiter des joies du parc fleuri de roses, le pensionnaire de la maison de repos a l’air d’être prêt à remonter la pente. François Cluzet, toujours brillant dans l’inquiétante étrangeté, donne beaucoup de crédit au sérieux de ce thérapeute sympathique fustigeant les archaïsmes d’une psychiatrie débilitante qu’il a entrepris de révolutionner par une méthode innovante et iconoclaste.

Ténébreux personnage

Petit à petit, cependant, le doute s’installe, jusqu’à ce que la gêne l’emporte vraiment : Robert se répète et se contredit, ses préconisations médicales semblent de plus en plus dangereuses, et sa manière de vanter les mérites du passage à l’acte laissent supposer qu’il l’a lui-même expérimenté. Sans doute est-il enfermé à Sainte-Marthe un peu plus longtemps que requis pour sortir d’une neurasthénie passagère… François Cluzet se transforme à mesure que se confie son personnage : l’homme poli et affable devient un calculateur cynique et froid, qui fait d’évidence trembler le psychiatre et l’infirmière qui reçoivent ses élucubrations comme autant de confidences puis d’aveux.

Comédien lumineux

Alain Lagarde a imaginé un décor dépouillé en forme d’espace mental. Le son de Samuel Favart-Mikcha et les lumières de Dominique Bruguière font deviner qu’il est peuplé de chimères et de fantômes. On est dans une chambre d’hôpital, mais surtout dans les tréfonds macabres d’un inconscient où la pulsion valse avec le ressentiment. Seul face au public, le comédien n’accroche aucun regard, le quatrième mur servant d’ultime censure à l’agressivité de cet esprit malade : sa solitude est bouleversante. François Cluzet prouve qu’il avait manqué au théâtre et que son talent d’interprète se déploie avec toujours autant d’aisance sur les planches.

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