Le Pharaon, le sauvage et la princesse [critique] : Trois contes enchanteurs et humanistes

© Diaphana

Pour gagner la main de sa bien-aimée, un prince du pays de Koush se lance à la conquête de l’Égypte ; un beau sauvage, mystérieux justicier, fait trembler les puissants d’Auvergne ; une princesse ravissante et hardie tombe sous le charme d’un simple marchand de beignets…

Maître d’un cinéma d’animation féérique, Michel Ocelot ouvre à nouveau pour nous son somptueux livre de contes, puisant son inspiration dans l’art et les récits du monde entier.

Cette fois, il propose une œuvre en forme de triptyque : trois histoires, trois époques, trois univers, narrés par une conteuse en bleu de travail aux ouvriers d’un chantier de construction. L’heure du repas a sonné, et aussi celle des histoires, auxquelles cet auditoire avide participe avec enthousiasme, nourrissant le récit de ses suggestions. Chacun des contes possède son propre style graphique : dans une esthétique épurée, Pharaon ! prend modèle sur les peintures et bas-reliefs de l’Égypte antique, tandis que Le Beau Sauvage, ancré dans l’Auvergne médiévale, fait appel aux silhouettes noires découpées sur fonds colorés qui faisaient la beauté envoûtante de Princes et princesses (2000), des Contes de la nuit (2011) et d’Ivan Tsarévitch et la princesse changeante (2016). Fantaisie orientaliste, La Princesse des roses et le prince des beignets s’inscrit plutôt, pour sa part, dans la lignée d’Azur et Asmar (2006), avec sa profusion de détails sensoriels, chamarrés et chatoyants.

Quel que soit le style, Ocelot nous éblouit par l’incroyable richesse visuelle de son cinéma et par la finesse de son écriture. Chez lui, les mots suscitent le même émerveillement que ses décors enchanteurs, ils sont aussi précieux que les bijoux des reines – ce qui n’empêche pas les dialogues d’être parfaitement limpides.

Dans cet écrin splendide, une ode à l’audace et à la générosité

On retrouve avec un immense plaisir ses héros et héroïnes aussi intrépides que généreux, déjouant avec intelligence la fourberie et la malveillance de ceux qui voudraient les maintenir sous leur joug. Débordant d’espoir et d’inventivité, les personnages rejettent la fatalité et se tournent résolument vers l’avenir. « Qu’est-ce que le destin, sinon le hasard et nos décisions ? », en viennent-ils à conclure. Le cinéaste célèbre leur énergie optimiste et volontaire, et nous murmure à l’oreille : c’est grâce à cette magie que nous rebâtirons le monde.

Le Pharaon, le sauvage et la princesse, sortie le 19 octobre 2022 : toutes les séances à Paris et en Île-de-France

Partager cet article sur :

Nos derniers articles

Retour aux sources pour Kiyoshi Kurosawa : avec Cloud, le réalisateur japonais réinvestit les champs de l'angoisse, sur fond de commerce en ligne et de société hyper-connectée. Il signe un film d'une maîtrise exemplaire.

À 56 ans, Wes Anderson, cinéaste au style inimitable, revient avec The Phoenician Scheme, qui succède à un cycle de courts-métrages autour des écrits de Roald Dahl, disponible sur Netflix.

Promettant de boucler les aventures d'Ethan Hunt, The Final Reckoning devrait clore également ce qui apparaît désormais comme la plus brillante franchise d'action de ces trente dernières années.

Filmé au plus près de ses héroïnes – admirablement incarnées –, le deuxième film de fiction de Konstantin Bojanov (Avé, 2011) porte un regard percutant sur la condition des femmes en Inde. Une dénonciation violente, politique et nécessaire.

La newsletter

Chaque mercredi, le meilleur des sorties culturelles à Paris avec L'Officiel des spectacles !