[critique] Emilia Perez, un conte moderne dédié à la tolérance et à l’acceptation

© PAGE 114 – WHY NOT PRODUCTIONS – PATHÉ FILMS - FRANCE 2 CINÉMA - SAINT LAURENT PRODUCTIONS - Shanna Besson

Le réalisateur de DheepanUn prophète, ou plus récemment Les Olympiades, est de retour avec une comédie musicale noire, récompensée à Cannes par un Prix du Jury et un Prix d’interprétation collectif.

Tout au long de sa carrière, Jacques Audiard a toujours démontré une remarquable diversité de styles. Le détenteur de la Palme d'or pour Dheepan (2015) était dernièrement revenu avec le drame parisien Les Olympiades (2021), étonnamment absent du palmarès cannois. Il est de retour avec Emilia Perez, une comédie musicale noire, cette fois récompensée à Cannes par un Prix du Jury et un Prix d’interprétation collectif pour ses trois actrices principales, Zoe Saldaña, Karla Sofía Gascón et Selena Gomez.

« De quoi parlons-nous aujourd’hui ? De violence, d'amour, de mort, d'un pays qui souffre » : la chanson d’ouverture interprétée par Zoe Saldaña pose d’emblée l’ambiance : dans un Mexique sombre, les cartels règnent en maîtres. Manitas del Monte, un puissant narcotrafiquant mexicain (Karla Sofía Gascón), décide de changer de sexe, pour enfin vivre en accord avec sa véritable identité. Pour ce faire, il engage Rita (Zoe Saldaña), une avocate talentueuse, pour orchestrer cette transformation. Quelques années plus tard, Rita croise à nouveau le parcours de son ex-cliente, devenue Emilia Perez, qui doit désormais naviguer entre ses anciennes relations et sa nouvelle identité. Celle qui fut jadis un délinquant notoire doit plus particulièrement se confronter à son ex-épouse (Selena Gomez) qui ignore tout de son changement.

Un mélange inédit entre Broadway et Jacques Demy

Jacques Audiard, qui a souvent exploré la thématique de la masculinité en lien avec la violence, déconstruit ici les stéréotypes de l’hypervirilité en abordant la transition de genre avec une empathie palpable. Si le récit imaginé par le réalisateur a une telle légitimité, c’est en partie grâce à la prestation saisissante de l’Espagnole Karla Sofía Gascón, qui incarne à la fois le viril Manitas et la douce Emilia. L’actrice avait elle-même entamé un processus de transition en 2018.

La force de son interprétation ne fait cependant pas passer au second plan la sublime mise en scène proposée par le réalisateur d’Un prophète. Jouant d’une esthétique résolument excessive, les tableaux sont un mélange inédit de Broadway et de Jacques Demy sur une bande originale pop et dynamique, composée par le tandem Clément Ducol et Camille. Dans ces numéros chantés et dansés, Zoe Saldaña, formée à la danse, exulte pour mettre en valeur ce conte moderne dédié à la tolérance et à l’acceptation.

Emilia Perez, sortie le 21 août 2024 : toutes les séances à Paris et en Île-de-France

Partager cet article sur :

Nos derniers articles

Pour son nouveau-long métrage et au fil d’une intrigue dont la mise en abyme est aussi fascinante que perturbante, Vincent Maël Cardona tisse un huis clos policier tortueux rappelant combien la réalité peut s’avérer plus aléatoire qu’elle y paraît.

Mis à jour le 21 août 2025 [Cinémas]

Présenté en compétition au dernier festival de Cannes, dont il est reparti auréolé du Grand Prix, Valeur sentimentale s’affiche au départ explicitement comme un hommage au cinéma de Bergman.

Plus de trente ans après le dernier volet, le réalisateur Akiva Schaffer relance la saga parodique culte Y a-t-il un flic... Cette fois-ci, Liam Neeson succède à Leslie Nielsen dans le rôle du détective gaffeur. Il forme, avec Pamela Anderson, un duo gagnant.

Un huis clos moite et redoutablement efficace signé Francis Galluppi, un nouveau venu dont l’insolente maîtrise saute aux yeux à chaque plan.

La newsletter

Chaque mercredi, le meilleur des sorties culturelles à Paris avec L'Officiel des spectacles !