[critique] Daaaaaalí ! : Les mille et un visages du génie

© Atelier de production - France 3 - Cinéma

Avec cette rêverie surréaliste autour de la figure de Dalí, Quentin Dupieux réalise une fantaisie ludique, dans laquelle Édouard Baer et Jonathan Cohen font des merveilles.

Après avoir signé, avec Yannick, l'un de ses plus beaux films, Quentin Dupieux s'attaque ici à ce qui, rétrospectivement, pourra sembler être une évidence. Le risque, avec Daaaaaalí !, serait même celui du ton sur ton. Que l'auteur, en s'attaquant à un maître du surréalisme, ne fasse qu'illustrer platement ce qui a toujours été l'un des creusets de son cinéma. À savoir un sens de la mise en scène des mouvements de l'inconscient hérité, précisément, du surréalisme.

Pour feinter le biopic convenu (allez donc chercher ici la plus petite anecdote factuelle sur la vie de l'artiste...), Dupieux a choisi de faire interpréter Dalí par rien moins que six acteurs. Parmi eux, Édouard Baer et Jonathan Cohen font des merveilles. Invités par certains cinéastes paresseux à pallier leurs propres manquements, en somme à faire tenir les films par leur seul sens de l'improvisation, ils trouvent ici en Dupieux un partenaire à leur mesure.

Le sens de la fête

Car c'est dans la direction de ses acteurs que Dupieux trouve la clé de son film. Chacun imite grossièrement Dalí, son accent, ses exclamations, le personnage qu'à force de formules absconses, il s'était créé... Mais cette grossièreté sert le projet, car c'est à une exagération, et par là même un dépassement, de l'image publique de Dalí, que procède ici l'auteur. Tout le monde cabotine, mais ce cabotinage, avec ce qu'il peut avoir de ridicule et d'enfantin, est l'expression la plus fidèle de ce que pouvait être Dalí : un amusement érigé en œuvre d'art.

On le sait : Dupieux est maître dans l'art de l'enchevêtrement des vignettes, de la mise en abyme – autant d'astuces qui invitent moins à traquer la logique complexe de la construction des films qu'à s'abandonner à l'absurde qui les caractérise... Mais il trouve ici, surtout, l'occasion de renouer avec une autre de ses influences, celle du cinéma de Buñuel. En 2018, Au poste ! s'achevait ainsi sur une citation explicite du Charme discret de la bourgeoisie... Or, l'association Buñuel / Dalí est tout sauf innocente. En 1930, avec L'Âge d'or, tous deux avaient signé l'une des œuvres majeures du surréalisme. Leurs chemins ne s'en étaient pas moins séparés par la suite, Dalí embrassant sans ciller la cause franquiste. Mais c'est encore une autre histoire...

Daaaaaalí !, sortie le 7 février 2024 : toutes les séances à Paris et en Île-de-France

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