[critique] Ma vie ma gueule : Barbie ou l’élégance du désespoir

© Christmas in July

Dans son ultime long-métrage, Sophie Fillières, avec finesse et cruauté, met en boite notre société et ses injonctions au bonheur et au bien-être.

Barberie Bichette dite « Barbie », 55 ans, est célibataire, a quelques kilos dont elle aimerait se débarrasser, un psychanalyste particulièrement mutique, et un don pour les rencontres incongrues. Dans son ultime long-métrage, Sophie Fillières, avec finesse et cruauté, met en boite notre société et ses injonctions au bonheur et au bien-être.

L’humour de la cinéaste se déploie sans réserve dans Ma vie ma gueule – titre d’emblée provocateur – et prend pour cible les travers de notre société trop rapide, trop individualiste. Surtout trop normée pour des personnes comme Barbie, qui court après une existence qui n’est finalement qu’un fantasme. Agnès Jaoui interprète avec beaucoup de justesse et de finesse ce personnage qui perd peu à peu le contrôle de sa vie en ne cessant jamais de s’interroger sur le monde qui l’entoure. Le cinéma de Sophie Fillières est un miroir tendu à nos contradictions, nos petits grains de fantaisie comme nos grandes crises existentielles. La réalisatrice de Gentille et Arrête ou je continue, ou encore de La Belle et la Belle, n’a jamais hésité à confronter ses personnages et ses récits à une douce folie. Barbie tente désespérément de garder la maîtrise de sa vie, et le film oscille entre désespoir poignant et pure cocasserie, dans une belle complicité avec le spectateur. Qui en effet n’a jamais parlé seul devant la glace de sa salle de bain ou mangé un McDo avec délectation et mauvaise conscience ?

Le miroir est brisé, mais que reflètent ses morceaux ?

Ma vie ma gueule, derrière son humour impertinent, aborde frontalement la question de la mort, mais parvient néanmoins à ne jamais tomber dans une atmosphère morbide. Grâce à sa poésie, l’élégance du désespoir affleure souvent, notamment dans les deux scènes avec Philippe Katerine, comédien aussi touchant qu’étonnant. Ce film testament de Sophie Fillières (elle n’a pas eu le temps de terminer la postproduction en personne), parachève une œuvre cinématographique singulière qui mérite d’être découverte ou redécouverte.

Ma vie ma gueule, sortie le 18 septembre 2024 : toutes les salles à Paris et en Île-de-France

Partager cet article sur :

Nos derniers articles

James Cameron nous dévoilera le troisième volet de sa saga Avatar. Révélées le 24 novembre dernier par les studios 20th Century, les dernières images promettent un film encore plus ambitieux et spectaculaire que les deux premiers.

Pour la première fois en 20 ans de carrière, Benoît Delépine signe un film sans son complice Gustave Kervern. Une séparation créative qui ne marque pas une rupture de ton, mais plutôt un recentrage.

Après Toni, en famille, Nathan Ambrosioni poursuit sa cartographie des liens familiaux, en y creusant cette fois le vide que laisse une disparition.

Mis à jour le 9 décembre 2025 [Cinémas]

Nominations, favoris et prédictions, organisation, diffusion télévisée, nouvelles règles... : tout savoir sur la 98e cérémonie des Oscars, qui se déroulera le 15 mars 2026 à Hollywood.

La newsletter

Chaque mercredi, le meilleur des sorties culturelles à Paris avec L'Officiel des spectacles !